lundi 29 janvier 2018

L'atelier

I
L'atelier la tour dans l'océan
la paix l'asile l'action répétée
l'oubli de soi et des autres enfin
l'abandon l'échouance et ce support à préparer
pour accueillir l'arrivée de l'essentiel
à coup de matériau d'outil d'enclume
de silicone de main qui sait
chercher la technique
le numéro de couleur la marque et le produit.

II
L'atelier dans l'arbre
Cette pièce où on nous laisse
jouer tranquille avec
les autres maisons dans les arbres et les familles qui vivent dedans
on choisit la tête puis le haut du corps
puis les jambes et on frotte
la craie grasse sur le papier
avec les pinceaux on étend
l'encre colorée des cahiers qui sont faits pour ça
ceux reçus pour jouer
j'ai passé tous les petits papiers j'en veux encore
les personnages à découper
le sable coloré à empiler dans le bocal d'eau
j'en veux encore.

III
Il m'étire l'atelier
dans toutes les directions
parce que c'est l'espace qui compte
l'espace entre les objets entre les idées
entre la porte et la table
entre l'Éden et la bombe H
l'extrême et le subtil
la rigidité cadavérique et le geste ressenti
Parce que c'est dans cet interstice que
l'évidence d'Éros et Thanatos étend ses doigts
jusque dans la représentation dans la manière
jusque dans le sens qu'on ne comprendra qu'ensuite peut-être
si on a de la chance
c'est dans cette fente exquise que
la prépondérance de la fuite ou celle de
la poursuite fait son choix à ma place.
J'y étire à mon tour cet espace
je l'étire et l'étire et puis
je lui donne de l'oxygène
je souffle sur les braises de ces silences enfin créés
j'allume les feux des désirs qui ne s'assouviront que
bien après ma propre fin
Si j'ai de la chance

IV
L'atelier le siège du processus
De l'apprentissage de la mort
et de la renaissance
Dans l'abandon les doutes
J'ai peur de ce tableau que je dois affronter et
du suivant et de l'autre ensuite
Je résiste
Je vais me briser peut-être
J'ai peur du ciel comme
un mouton laissé au champ pendant la nuit
Je dois m'abandonner dans les bras de mon tableau
pour accueillir ce qu'il me porte
en échange de ma bravoure
Je sais maintenant que je suis mortelle.

jeudi 25 janvier 2018

Collectif "L'Atelier" chez Tommy Zen


photo Suzane O'Neill
J'ai ce grand honneur de participer à l'exposition collective "L'Atelier", concoctée par l'audacieuse galeriste France Cantin à la  galerie Tommy Zen, nouvellement installée au 1452 rue Sherbrooke Ouest à Montréal, à deux pas du Musée des Beaux-Arts.

Une galerie rafraîchissante et à connaître et une exposition qui vaut franchement le détour pour la qualité et la sincérité du travail présenté. 

Outre moi-même, vous y trouverez les oeuvres des artistes Caroline Auclair, Julien Clément, Fredo Haddock, Ian Gamache, Étienne Martin, Suzane O'Neill, Frédéric Péloquin, Jérôme Prieur, Michel Robidas, David Roche, Josiane Saucier, Estelle St-Pierre et Patrycja Walton  en plus d'objets choisis dans l'atelier du grand peintre feu Armand Tatossian.


Les artistes du collectif  "L'Atelier" (photo Michel Bazinet)
La galerie (photo Suzane O'Neill)
photo Suzane O'Neill








photo Suzane O'Neill










Exposition en cours 
du 11 janvier au 10 mars 2018  
à la Galerie Tommy Zen
1452 Sherbrooke Ouest, Montréal
secteur MBAM.



Ce que j'y présente:











Le tableau Mourir n'est qu'un état 
Huile sur panneau de bois 
24'' x 30''
2017
1600$ 
(article de blogue sur ce tableau ici)








Cette photo prise en atelier par le photographe Georges Dutil et ce texte, réflexion sur l'atelier.



La mort n'est qu'un état

Mourir n'est qu'un état, huile sur panneau de bois, 24" x 30'', Galerie Tommy Zen jusqu'au 10 mars 2018


































L'atelier le siège du processus
De l'apprentissage de la mort
et de la renaissance
Dans l'abandon les doutes
J'ai peur de ce tableau que je dois affronter et
du suivant et de l'autre ensuite
Je résiste
Je vais me briser peut-être
J'ai peur du ciel comme
un mouton laissé au champ pendant la nuit
Je dois m'abandonner dans les bras de mon tableau
pour accueillir ce qu'il me porte
en échange de ma bravoure
Je sais maintenant que je suis mortelle.

On sait que la peur est un sentiment que l'on se doit d'affronter si l'on veut avancer. 
On s'accroche parfois à des techniques ou à une façon de voir parce qu'on s'y sent à l'aise ou parce qu'on est "un pro", pas question donc de montrer qu'on n'est pas en pleine possession de ses moyens. Dans l'art comme dans la vie, on ne montre pas facilement sa vulnérabilité.

Avec ce tableau, j'ai brisé ces tabous qui avaient germés en moi et qui, je le sentais bien, grandissaient. J'avais peur du noir. Je n'utilisais plus aucun noir dans ma peinture, jamais. Comme dans l'aquarelle, j'avais peur de perdre la lumière. Je ramenais toujours tout au blanc, pas question de la perdre. Pour moi, elle devait partir du fond et résister à tous les coups de pinceaux jusqu'à la surface. 
"Je ne suis pas peintre" disais-je, et c'était vrai. Venue du monde du dessin/croquis, le seul élan qui trouvait grâce à mes yeux était le tout premier jet. Peur de perdre l'élan, comme si je m'étais cru incapable de renouvellement. Je voulais des tableaux dessinés. 
Disons-le franchement, derrière ma confiance en moi se cachait une peur bleue de la mort. J'ai donné un grand coup de pied dans toutes ces peurs. J'ai accepté de reculer pour mieux repartir. J'ai accepté de désapprendre tout ce que je savais. .

J'ai repris tout depuis le début, déposé l'acrylique et l'aquarelle un temps, choisi l'huile comme matériau parce que tout s'y balaie et retourne au gris en quelques coups de pinceaux. Toutes mes craintes en un seul médium.
Puis, j'ai appris que de rien on renait.
Ce n'est pas triste, au contraire c'est merveilleux.
Je me suis surprise à prendre un grand plaisir à tuer, moi la colorée pacifiste. De mon atelier, on a certainement entendu des grands éclats de rire sur tout l'étage.

Je ne suis plus la même personne ni la même artiste désormais. 
Je n'ai plus peur. 

Et maintenant je peins.
Quelques uns des "états" qu'a traversé le tableau.


































Ce tableau, je ne pensais jamais l'exposer. Ici, seul le processus m'intéressait.  C'était un corps à corps avec moi-même, un journal très intime.
C'est entre deux renaissances qu'il fût interrompu. La galeriste France Cantin l'a intercepté pour l'exposition collective "L'Atelier" présentée à la galerie Tommy Zen du 11 janvier au 10 mars 2018. Je crois qu'elle y a perçu un processus important et elle avait raison, c'est même le plus crucial que j'ai vécu jusqu'à maintenant dans ma vie adulte. Jusque là, j'étais une enfant artiste. 
Je ne suis plus aussi innocente. 
J'ai entâmé un dialogue avec mon travail qui fait maintenant partie de ma vie et ce, à travers tous les médiums que je touche. Ma perception de la vie a également changé. Je me sens plus incarnée, plus mortelle, plus vraie. 
Je savourais la vie, j'en ressens maintenant mieux tous les aspects.  

Voir ici l'article sur l'exposition chez Tommy Zen.